Le dernier rapport de la société de conseil Capgemini le montre bien : La crise sur les marchés de matières premières a bien laissé des traces sur le continent africain. La fortune des millionnaires a baissé. Faut-il remettre en cause le modèle de croissance ?
Ces dernières années, les fortunes africaines avaient augmenté tous les deux ans. Cette croissance avait même nourri l’espoir que l’Afrique pourrait davantage financer sa croissance par la richesse créée sur le continent. En 2010 et 2011, le capital des millionnaires africains s’élevait à 1100 milliards de dollars pour monter en 2012 et 2013 à 1300 milliards de dollars. En 2014, leur tirelire s’était grossie pour atteindre 1400 milliards de dollars. Bien que leur fortune affichée soit restée stable l’année dernière, elle a tout de même légèrement baissé de 3,2%.
L’évolution de la richesse laisserait penser que les choses bougent peu. Mais en fait, les bouleversements ont été énormes ces dernières années. En 2010, c’était encore l’Amérique du Nord qui hébergeait avec 11.600 milliards de dollars le plus grand trésor privé. Aujourd’hui, le plus grand butin des millionnaires du monde se trouve en Asie avec une richesse cumulée de 17.400 milliards de dollars renvoyant les Américains du nord au deuxième rang avec seulement 16.600 milliards de dollars.
A l’avenir, l’Afrique restera à la traîne en ce qui concerne la croissance des aisés, estiment les chercheurs de Capgemini. D’ici l’année 2025, la richesse des riches augmentera de plus de 80% au niveau global. L’Afrique restera selon Capgemini à la traîne avec une croissance de seulement 65,5%.
Et alors ? diront certains. Ce serait plutôt bonne chose et pourrait nourrir l’espoir d’une croissance plus équitable sur le continent africain. En fait, le contraire sera le cas. Jusqu’à présent, la croissance économique en Afrique dépend largement de l’afflux de capitaux étrangers sous forme d’aide au développement ou sous forme d’investissement étranger, effectué par exemple par des fonds de participation en capital. Le revers de ces investissements étrangers est que les investisseurs réclameront leur part des profits que ces projets d’investissement vont générer. Une partie au moins des profits générés sur le continent africain sera exportée vers l’Amérique du nord, l’Europe ou l’Asie. Plus l’Afrique arrivera à financer sa croissance par sa propre épargne, plus grande sera la chance que les profits générés en Afrique seront réinvestis en Afrique.
Le deuxième point négatif est que l’Afrique est encore trop dépendante des matières premières et de produits agricoles et de l’exportation de ces produits à l’état brut. Or, toujours selon Capgemini, ces deux secteurs ne pousseront pas la constitution de richesse privée. Le secteur minier et agricole ne croîtra que de 18,9% d’ici 2025 alors que le secteur financier sera le secteur le plus dynamique sur la planète avec une croissance de près de 36% d’ici 2025 suivi par la haute technologie et la santé qui, eux, progresseront chacun de plus de 30% aussi.
En fait, ces tendances ne s’excluent pas forcément. Le rapport Capgemini souligne à nos yeux la nécessité de soutenir les efforts d’africaniser les bienfaits de la croissance sur le continent. Et il montre également le besoin en Afrique de créer une gestion professionnelle de l’épargne privée. Le continent a besoin d’institutions financières qui aident la grande masse de la population à constituer une épargne. Et il a besoin de gestionnaires de fortune qui aideront les millionnaires à gérer leur fortune sur place, en Afrique.
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