La croissance économique en Afrique se ralentit depuis quelques années – faute à une trop grande dépendance des matières premières. Un sujet-clé du Forum Afrique Développement 2017.
Le verdict de Miriem Bensalah-Chaqroun, présidente de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), ne manque pas de clarté : « La croissance en Afrique n’a pas un impact significatif sur la création de l’emploi et une amélioration des conditions de vie », avait-elle déploré lors du Forum International Afrique Développement organisé le 16 et 17 mars 2017 pour la 5e fois par la banque marocaine Attijariwafa bank à Casablanca. « La part du secteur industriel dans le PIB africain atteint à peine 10%. L’Afrique ne crée pas et ne transforme pas encore assez de valeur », disait Mme Bensalah.
Mme Bensalah déplorait notamment un ralentissement net de la croissance économique en Afrique sur les dix dernières années et réclamait entre autre la création de nouveaux secteurs forts sur le continent, une amélioration de la gouvernance et une meilleure formation de la main d’œuvre. « La plupart des économies africaines dépendent toujours de matières premières non transformées, et l’évolution vers une industrialisation est lente. »
Ce diagnostic de la lobbyiste des entreprises marocaines se recoupe avec notre analyse : La croissance de l’économie africaine depuis le début des années 2000 est indéniable. Mais dans beaucoup de pays elle dépendait trop de ressources telles que le pétrole, le gaz naturel, l’or ou les diamants.
Utiliser les matières premières pour lancer une dynamique de croissance peut s’avérer comme une stratégie bien adaptée aux conditions trouvées dans certains pays. Mais une croissance qui dépend des matières ne peut être durable, l’exploitation des matières premières créant des rentes et non pas des profits. Une économie de rente est particulièrement encline à l’appropriation de ces rentes par une petite caste, à la corruption, à la mauvaise gestion et à l’étouffement de la dynamique économique du pays.
Les pays africains ayant réussis le mieux ces dernières années sont ceux où la dynamique économique fut déclenchée par la jonction d’internet et de la téléphonie mobile. Elle a favorisé l’émergence de nouvelles activités économiques, d’une culture de start-up et d’une société civile. Or, la croissance et surtout l’industrialisation du continent africain se heurtent trop souvent à une productivité du travail trop faible due à un manque de formation parmi la main d’œuvre africaine, des infrastructures défaillantes et à un manque d’efficacité dans l’administration publique.
C’est pourquoi nous partageons l’analyse faite par Mme Bensalah devant environ 2000 participants de ce Forum qui, une fois de plus, fut une grande réussite grâce aux efforts de l’équipe autour de la responsable du Forum, Mme Mouna Kadiri. Un des atouts du Forum est que les participants ne se sont pas bornés à échanger des discours gentils, mais de nommer sans ambiguïté des difficultés rencontrées sur le continent.
Ainsi, Mme Bensalah a appelé les gouvernements africains à créer enfin de vrais partenariats public-privé afin de développer ce continent. Les secteurs que la représentante des entreprises marocaines a cités sont notamment l’agro-alimentaire, les énergies renouvelables, la construction de logements, les infrastructures et la digitalisation.
Au vu des défis à relever, l’état des lieux Mohamed El Kettani, PDG du groupe Attijariwafa bank, était plus clément: « Dans un environnement d’incertitudes, l’Afrique maintient le cap », disait El Kettani selon le compte-rendu du journal L’Economiste. Le continent serait à la croisée des chemins: une croissance mondiale atone, un commerce mondial en mode remontée de pente et des prix des matières premières extrêmement instables. Un cocktail imprévisible, alors que l’on sait que le continent n’aurait plus droit à l’erreur: chaque point de croissance compte.